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PROLOGUE 16 page





– Vous émettez d'abjectes hypothèses! gueule Kléber.

Le Gladiateur bondit.

– Prends‑le pas su' c' ton, beau marle!

Il l'encercle de ses bras et le soulève pour, tu devines quoi? Le planter debout dans la baignoire. La flotte ne doit plus être à cent degrés, mais reste susceptible de préparer un bon pot‑au‑feu.

Oh! cette clameur!

Faut pas venir me dire que la môme de Dom Rémy (fa sol la si do) ne moufta pas quand l'évêque Cauchon la déguisa en barbecue! On va pouvoir préparer des compresses à l'huile d'amandes douces pour ses brûlures! Remarque, qu'un individu se prenant des braquemiches quotidiennement soit en cloques, n'a rien d'illogique.

N'écoutant que mon bon cœur, j'écarte Bibendum pour sortir le malheureux du court‑bouillon! Rose jambon de Parme, il est! Ses chailles interprètent le grand solo de castagnettes de l'Esmeralda!

Toujours frère du Bon‑Secours, je lui emmitoufle les cannes dans des serviettes de bain.

Puis je gueule contre le Pourceau:

– Tu te crois au Moyen Age, figure de fesses!

Il hausse les épaules.

– Les temps se perdent, annonce‑t‑il. D'nos jours on n'sait plus rigoler!

 

 

Après avoir défouraillé à bout portant sur le jeune flic, Monosperme songea que le temps se gâtait pour sa pomme.

Comble de bonheur, une sirène de police glapissante se pointait dans la rue, pour cesser devant le bouge. Soucieux de se désencombrer de la fliquette volcanique, il lui virgula un magistral coup de crosse au‑dessus de l'oreille droite. Sainte Marie de la Poule rentra en elle‑même et s'effondra sur l'atroce moquette du palace à punaises.

Pendant que le Noir anesthésiait sa partenaire, le tenancier fonçait dans l'escadrin en bieurlant «Au secours! A l'assassin!» ce qui était la moindre des choses, vu la situasse.

Le cousin de Jérémie jeta à la misérable piaule une œillerie d'homme traqué. Côté couloir, la retraite était coupée tel un prépuce de rabbin. Ne s'offrait que la malheureuse fenêtre aveuglée avec du papier à fleurs. Il l'ouvrit avec difficulté. Elle donnait sur un espace, entre deux immeubles, ne méritant même pas l'appellation de cour. Il enjamba la barre d'appui, considéra le vide, l'estima à quatre mètres et sauta.

Sa chute fut amortie par les pouilleries accumulées au cours des dernières décades. Le truand s'arracha à cette vaste poubelle qui échappait aux éboueurs et fonça vers la seule ouverture possible: une porte à demi vitrée. Elle était fermée de l'intérieur par quelque loquet qu'il fit sauter d'un coup d'épaule.

Il se retrouva dans la réception de l'hôtel, pile au moment où l'androgyne y parvenait. Avec une promptitude de cobra, comme dirait un autre auteur, Monosperme bondit sur «la créature» et enfonça le mufle[49] du riboustin contre son pancréas. Puis le poussa en direction de la lourde laissée béante par les deux poulardins venus à la rescousse.

Une voiture de police stationnait devant l'entrée avec un flic au volant, lequel faisait le radioreportage de l'opération pour la maison mère.

Le cousin possédait des réflexes de guépard[50]. En moins de seize secondes, il estourbit le mutant, se rua dans la guinde poulardière, arracha les fils de l'émetteur et mit le canon du flingue entre deux bourrelets du drauper.

– Avec ta gueule de cornard, tu dois sûrement avoir des chiares, fit‑il; alors pense à eux et laisse l'héroïsme aux célibataires!

Son terlocuteur se résigna.

– Puisque tu le dis, soupira‑t‑il.

– Maintenant décarre plein tube!

Le véhicule démarra dans le plus pur style hollywoodien.

– Arrête ta sirène, ajouta Monosperme; elle me casse les couilles.

Le flic obéit.

– Quelle direction? s'informa le conducteur avec calme.

– Porte d'Italie. Tu chausses du combien?

Surpris, l'otage répondit:

– Quarante‑quatre.

– Moi du quarante‑trois. Quand on s'arrêtera tu me passeras tes pompes; j'en ai paumé une en sautant par la fenêtre.

Monosperme ne se doutait pas que l'incident jouait en sa faveur, car il avait perdu le soulier pourvu du bip.

 

 

Un peu de cendre de cigarette était tombée sur sa veste immaculée. L'homme à la barbe noire en parut chagriné et souffla pour dissiper le désastre.

– Ne frottez pas, surtout! recommanda Jérémie, comme s'il eût été son valet de chambre familier.

Ce conseil dérouta celui que Blanc appelait «le Prince» dans son for intérieur. Son regard ardent se posa sur le prisonnier; il exprimait la surprise. L'Arabe comprenait mal qu'après le coup de théâtre résultant de l'entrée du Rouquin, ce Noir conservât pareille tranquillité d'esprit.

– Vous êtes coriace, remarqua‑t‑il.

– Pas particulièrement, fit Blanc.

Son interlocuteur jeta sa cigarette à demi consumée sur le sol.

Jérémie demanda à Mathias comment il allait.

– Bien jusqu'à présent, assura le Rouquemoute en faisant preuve du même flegme.

– Je vous interdis de communiquer! dit l'homme au turban vert.

Il se leva, vint à ses prisonniers et déclara:

– Tout, dans ce local, a été conçu pour faire parler des gens décidés à se taire. Nous pouvons vous placer des électrodes dans le fondement en y faisant passer un courant électrique. Ou bien vous suspendre par les testicules aux crochets que vous apercevez là‑bas. Je peux appeler un vieux sage, plein de dextérité, capable d'enlever au rasoir la moitié de votre poids sans vous mettre à mort, ou emplir votre bouche de grosses fourmis rouges qui se disperseraient dans votre tube digestif et vos voies respiratoires. Mille autres choses encore, aussi variées qu'insoutenables. Les individus les plus courageux, les plus obstinés, les plus endurants, finissent par céder devant la souffrance. Allãh nous a créés ainsi: vulnérables et prêts aux soumissions. Pourquoi subiriez‑vous d'effroyables tortures pour une cause qui vous est étrangère et dont vous ignorez l'essentiel?

Satisfait de son laïus, il considéra alternativement les deux hommes.

Mathias soutint l'intensité du regard.

– On m'avait parlé de l'hospitalité arabe, murmura‑t‑il. Je crois cette réputation injustifiée.

Il déclara cela en anglais. «Le Prince» resta impassible.

– Où sont les quatre clés? riposta‑t‑il seulement.

– Je l'ignore, assura le Rouque.

– Faux! Vous êtes allé les cacher dans une cabine téléphonique devant l'aéroport. N'est‑ce pas? cria‑t‑il à Jérémie.

Blanc fit la moue.

– Vos gardes m'ont appréhendé près de celle‑ci, pour m'emmener directement chez vous.

– Eh bien?

– Elles ne sont pas en ma possession. Fouillez‑moi, vous vous rendrez compte que je dis vrai. Passez‑moi à la radio, si vous pensez que je les ai avalées.

– Ce ne sera pas la peine, assura le barbu, ces clés sont faites dans un alliage d'une extrême rareté, réagissant à un appareil qui, vous vous en souvenez, a été promené sur toute votre personne lorsqu'on vous a amené ici. Par conséquent elles ne sont pas sur vous.

– Dans la cabine téléphonique, alors? suggéra le Noirpiot avec un sourire qui l'aurait fait admettre dans la brigade du fleurisseur de la place des Pyramides[51].

– Elle vient d'être examinée au détecteur.

– En ce cas, donnez votre langue au chat.

L'homme à la barbe noire le souffleta.

– Il en est terminé de vos railleries, sale nègre, dégurgita‑t‑il, vous l'aurez voulu!

Et il cria un ordre à l'adresse d'un personnage discret, adossé au mur.

Le gazier sollicité fit une courbette et, avant de s'approcher des prisonniers, alla prendre un instrument à la panoplie de tortures. L'objet ressemblait à une percerette comme on en trouve dans toutes les quincailleries du globe, voire même chez celles des planètes avoisinantes.

– Pour débuter, avertit «le Prince», on va introduire cette mèche par le canal de votre urètre et la vriller jusqu'à ce qu'elle atteigne les testicules. Cette intervention terminée, le conduit de votre pénis aura triplé de diamètre; généralement, cette manipulation suffit à rendre loquace le plus silencieux des patients.

– La mèche ne parviendra jamais à destination, assura Jérémie.

– Pourquoi?

– Parce qu'elle est plus courte que mon membre, déclara le prisonnier.

Il lut dans les yeux du barbu une certaine admiration pour sa crânerie.

– Si tel est le cas, nous raccourcirons votre pénis, affirma‑t‑il d'un ton placide.

Et il fit signe au bourreau.

Comme ce dernier s'approchait, Mathias prit la parole. Cette fois, il le fit en arabe, car ce diable, tu t'en souviens sûrement, parle toutes les langues usuelles de la terre et de ses pays limitrophes.

– Vous me permettez de vous dire quelque chose, cher monsieur.

Surpris, le maître des lieux se tourna vers l'Albinos assermenté.

– Je vous écoute?

– Sans vouloir leur nuire en aucune façon, je trouve que vos sbires font leur travail en dépit du bon sens.

– Expliquez‑vous.

– Ils m'ont arrêté et ne m'ont pas passé les menottes. Ensuite, ils m'ont fouillé en ne s'intéressant qu'aux armes que j'aurais pu avoir.

Tout en parlant, il sortit de sa poche un petit appareil photographique dont nous tairons la marque.

– Je dirige le laboratoire de police technique et mon violon d'Ingres consiste à inventer des gadgets d'un genre particulier. Voyez plutôt!

Il braqua le viseur en direction de l'un des gardes, pressa le bouton.

Immédiatement, le «visé» tomba à genoux, puis s'écroula tout à fait.

Sans sourciller, Mathias ajusta le bourreau et le foudroya.

Stupeur générale, bruit d'armes dégainées.

– Stop! lança le Blondinet, sinon je neutralise votre monarque!

Il tenait l'appareil dirigé vers «le Prince» qui n'en menait pas large.

– Otez ses menottes à mon ami! fit‑il.

Blanc intervint:

– Laisse quimper, je m'en débarrasserai tout seul, reste vigilant!

Il réussit l'exploit annoncé en un minimum de temps.

– Vos cadennes sont moyenâgeuses, commenta Jérémie. Il m'a suffi de gonfler les muscles du poignet quand ils me les ont mises, pour que je puisse maintenant m'en séparer.

L'homme au turban vert, abasourdi, regardait tour à tour ses gardes inanimés et l'objet venant de les mettre à mal.

– Rassurez‑vous, dit Mathias à Barbapoux, vos gars ne sont pas morts mais en léthargie. Normalement, d'après mes prévisions, au bout de trois ou quatre jours, ils auront récupéré.

– Tu es un mec sublime! murmura Blanc. A présent nous devons nous tirer de ce bourbier.

Se tournant vers l'Arabe, il déclare:

– Voilà ce que je propose. Vous allez nous escorter à l'aéroport où m'attend le jet qui m'a amené. Nous le prendrons ensemble et vous relâcherons à Paris. Correct?

L'interpellé ne souffla mot. Toute son attention se concentrait sur le gadget du scientifique. Visiblement, il avait peur.

– Enjoignez à vos hommes de ne rien tenter, continua Jérémie, vous en feriez les frais.

Ils se dirigèrent vers la porte. L'Arabe marchait devant, le viseur du faux appareil photographique entre les omoplates.

– Ah! j'oubliais, lança Jérémie, cet homme nous accompagnera.

Il désignait le chef qui l'avait arrêté à l'aéroport.

L'individu ne broncha pas.

– Dites‑le‑lui vous‑même! fit l'époux de Ramadé.

Docile, Barbapoux répercuta l'ordre.

Lorsqu'ils furent devant la porte de l'aérogare, le bon Sénégalais murmura:

– Je devine ce que vous ressentez, Monseigneur. Cependant, n'oubliez pas qu'en un millième de seconde vous pouvez vous écrouler. Mon ami prétend que ce serait pour quelques jours, mais il n'a pas parlé des séquelles, encore inconnues.

Leur prisonnier était un personnage archiconsidérable car il n'y eut pratiquement pas de formalités avant l'embarquement.

Ils voyagèrent à l'étroit dans ce zinc inconçu pour balader des passagers. Heureusement la vitesse compensait l'inconfort.

 

* * *

 

A Villacoublay, un véhicule de l'armée chargea le petit groupe.

– Où souhaiteriez‑vous que l'on vous dépose? demanda Blanc. A votre ambassade, sans doute?

– Non, au Ritz! grommela le touriste contraint.

– C'est une excellente adresse. J'y ai dîné à plusieurs reprises, la table est parfaite.

Parvenu devant le palace où la chère Diana prit vraisemblablement son ultime pied, Jérémie descendit le premier pour ouvrir la portière du «Prince» et la tint également à l'intention de l'officier.

– Navré de vous avoir infligé ce voyage, dit‑il; vous permettez?

Sous les yeux médusés des deux hommes, il plongea la main dans une poche du militaire.

– Veuillez me pardonner ces manières désinvoltes, déclara‑t‑il, mais je tiens à récupérer ce que je vous ai confié à votre insu au moment où vous me passiez les menottes.

Il extirpa quatre minuscules clés comportant chacune une lettre et un chiffre gravés.

– Elles ne pouvaient être davantage en sécurité que sur vous, ajouta‑t‑il.

Et Jérémie remonta dans la voiture.

 

 

Le premier réflexe de Pinaud fut de porter assistance au policier écroulé à ses pieds. Il comprit qu'on ne pouvait plus rien pour l'invétéré dormeur, lequel, cette fois, piquait un roupillon éternel.

Alors il s'occupa de sa victime: un individu assez corpulent dont l'accoutrement «disait quelque chose» à ce vieux limier. Très vite, il sut. L'homme n'était autre que le compagnon de Gudule de la Bruyne, celui qui avait opéré des recherches avec elle devant la maison du jeune Léandre. Sa grossière veste de toile beige et sa casquette à carreaux confirmaient l'intuition de César.

Il s'accroupit auprès de lui, constata qu'il avait les yeux ouverts et suivait ses faits et gestes.

– Je vais appeler une ambulance, fit Pinuche en sortant son portable dernier cri empletté la veille.

Le blessé eut une vague mimique signifiant que ça n'était pas la peine.

– Mais si, mais si, insista le digne homme; tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir.

Le type à la veste imperméabilisée demanda d'une voix très basse:

– Vous m'avez mis combien de balles dans le corps?

– Trois! lui répondit César, un peu gêné.

– Merci pour le renseignement.

– Je vous en prie!

Puis il prévint Police Secours en priant qu'on dépêche une ambulance. Comme le mourant semblait s'intéresser à son téléphone, la Vieillasse l'approcha de ses yeux en lui expliquant que l'appareil constituait l'aboutissement de la technique, mais l'intérêt du blessé parut faiblir.

– Vous faisiez équipe avec Gudule de la Bruyne? s'enquit Pinaud.

– Exact!

– Vous cherchiez quelque chose dans la rue des Fran‑macs à Louveciennes, un matin, en compagnie de cette personne?

– Oui.

– Cela vous contrarierait de m'apprendre ce dont il s'agissait?

– Du tout. L'un de nos hommes, chargé de mettre à mal le jardinier, la veille, avait perdu une chevalière à l'intérieur de laquelle son nom était gravé.

– Il est maladroit.

– Non, il a maigri.

Le blessé exhala un long gémissement qui peina César Pinaud.

– Puis‑je faire quelque chose pour vous? s'inquiéta‑t‑il.

– Vous l'avez déjà fait, ricana le presque moribond. Si vous avez encore une question à me poser, faites vite!

Le riche retraité murmura:

– Vous êtes de bonne composition.

– Non, foutu! On voit la vie différemment.

– Que tramiez‑vous ici, dans une propriété où ont été perpétrés des meurtres et que la police surveille?

– Mon compagnon et moi guettions la venue de quelqu'un. De quelqu'un qui finira par se montrer.

– De qui? interrogea la Vieillasse.

Comme la réponse tardait, César insista:

– Hein, dites? Qui doit venir au château, et pourquoi?

Mais l'homme gardait toujours le silence.

Il avait une bonne raison pour cela: il était mort.

Très vite on évacua les deux cadavres.

Ensuite, Pinaud gravit l'escalier menant à l'étage.

 

 

Les jambes de Kléber Dintzer étaient aussi rouges que celles d'un homard[52] venant de subir le même traitement et se marquaient de vilaines cloques.

Pris de compassion (on ne se refait pas, ou alors plus mal), je lui tendis, faute de mieux, un flacon d'huile solaire.

– Essayez toujours de vous oindre, fis‑je.

Bérurier prit mal mon geste.

– Non, mais j'vais croire qu'y t'a tapé dans l'œil, c'merlu! T'es prêt à lu faire un don d'orgasme! C'est ses crins blancs qui t'charment?

J'endiguis son courroux d'un clignement de mes longs cils. L'apôtre se souvint alors que la tactique éprouvée de deux flics questionnant un prévenu consiste à souffler l'un le chaud, l'autre le froid.

Du coup, le Dodu laissa quimper le linge préservant sa pudeur et s'en fut licebroquer d'abondance.

– Bien, ébroué‑je. Dintzer travaille dans la came, vous Dressompert, dans le terrorisme de haut niveau. Est‑ce l'amour qui vous a fait «fusionner»?

Comme aucun d'eux ne mouftait, j'ajoutis:

– Alors, l'intérêt?

– Sans doute les deux, finit par murmurer le journaliste.

Que devenait ma petite Antoinette pendant que je questionnais ces types? Je voulais la rapatrier coûte que coûte chez nous, l'arracher à la Suède, ce réfrigérateur de luxe. Qu'elle pense en français, surtout. Que pouvait‑on dire en suédois? Sinon féliciter un prix Nobel!

Cet aparté surmonté, je revins à mes duettistes.

– Et puis merde! soupirai‑je.

Les trois hommes me fixèrent, stupéfiés.

– Caisse y s'pasme? s'inquiéta mon compère Gloriole. Tu démarres ton retour d'âge ou bien?

– Un truc dans ce genre, convins‑je.

– Tu veuilles qu' j' t'remplace? A la guerre, quand l'capiston est buté, c'est l'ieut'nant qui prend les choses en main.

Une nouvelle fois, il eut droit de ma part à un clin de mirette discret et s'arrêta de poser ses prétentions.

Comme j'allais repiquer au labeur, nous perçûmes le ronflement d'une tire devant la propriété. On en coupa le moteur et des pas firent crisser les fins graviers.

– Vous attendez du monde? demandé‑je à nos enchaînés.

– Absolument pas! répondit le journaliste.

J'allis au fenestron d'aération et réussis à mater le terre‑plein d'arrivée. Je vis une bagnole grise. Trois hommes en sortirent, plutôt insolites dans ce paradis vacanciel. Ils ne portaient pas de fringues estivales, mais des harnais dans les teintes marron et gris. Bien que je les distinguasse assez mal, ces mecs ne me produisirent pas un bon effet. Tu as certainement vu des tueurs à gages dans les ricaineries? Eh bien ça!

Deux d'entre eux possédaient des tronches carrées et avaient un trou comme un anus de bébé au menton. Le troisième, nettement plus âgé, me sembla être le chef, sans doute à cause de sa mise plus recherchée et de ses façons autoritaires.

Pour commencer, ils s'approchèrent de la Ferrari jaune, attirés par le merveilleux bolide, le lorgnèrent sur tout son pourtour, puis gagnèrent la porte d'entrée.

Nous entendîmes le timbre mélodieux de la sonnette, actionnée à plusieurs reprises; ensuite une grêle de coups impatientés ébranlèrent l'huis.

Je fis face au tandem enchaîné.

– Trois vilains, annonçai‑je; ça vous dit quelque chose? Ils s'amènent directo du continent car ils sont loqués automne.

– Mon Dieu! s'exclama Dintzer, oubliant ses brûlures, ce sont eux!

– C'est‑à‑dire? fis‑je.

Il haussa les épaules.

– Des amis qui nous veulent du mal.

– Parce que vous les avez doublés?

Il n'eut pas le temps de répondre: un bris de verre retentissait au rez‑de‑chaussée.

– Enlève‑leur tes cadennes! chuchotai‑je à Sa Majesté l'Empereur.

Pour une fois, il obéit sans argumenter.

Sitôt désentravés, les deux bouffe‑bites se précipitèrent dans leur chambre à coucher pour mettre un slip et y prendre une arme. De toute évidence, Kléber savait mieux se servir de sa calculette que d'un pistolet. Sa main tremblait fort et je n'eus aucune peine à le lui ôter. Rapide regard au chargeur: il contenait six bastos en pleine neurasthénie.

– T'en as pas un aut' pou' ma Pomme? s'enquit le Ventru.

Dintzer dénégata.

Une angoisse intense gagnait les deux folles. Cette visite imprévue leur semblait plus dangereuse que la nôtre, si j'en jugeais à leur panique.

Les marches vibraient; les trois survenants faisaient autant de bruit qu'une horde teutonique.

– Portez‑vous à leur rencontre, enjoins‑je en poussant Roméo et Jules hors de la chambre; nous restons prêts à intervenir.

En flageolant, ils m'obéirent.

Je refermai la porte sans toutefois que le pêne joue.

Les pas atteignirent l'étage.

– Eh bien voilà nos amis! s'écria une voix teintée d'un accent levantin.

Les chérubins ne purent proférer une syllabe.

– Alors c'est ici que vous êtes venus planquer le magot? reprit l'arrivant. Madère! L'île de l'éternel printemps! Pas bête; c'est proche du continent et il y fait bon vivre. Seulement vous avez compté sans le flair du bon Samy! Quand j'entreprends des opérations importantes avec des associés, je me soucie de leurs moindres faits et gestes. Ainsi, cette maison, mon bon Kléber, je connais son existence depuis que vous l'avez acquise, et j'ai tout de suite deviné dans quel but vous l'achetiez. Ne me restait plus que d'attendre votre trahison, beau jeune homme! De la sorte, c'est vous qui avez pris tous les risques pour sortir le pactole de France. Je n'ai plus qu'à rafler la mise et la mettre ailleurs. Chez vous, on appelle cela tirer les marrons du feu, n'est‑ce pas?

– Ecoutez, Samy, bredouilla le gérant de fortunes, on devrait pouvoir s'arranger.

– Naturellement, admit l'homme; comme cela, par exemple.

J'entendis le claquement feutré d'un silencieux. Entrouvrant la porte de quelques centimètres, je constatis que le talentueux Yvan Dressompert venait de se morfler, pratiquement à bout touchant, une praline de fort calibre dans le cœur.

– Non! Non! Pitié! égosilla le bel ébouillanté. Prenez tout, mais ne me tuez pas!

– Tu crois? demanda «l'élégant» en lui appliquant le canon de son Turlututu au milieu du front.

Cette fois, cela fit un gros baoum, non que son silencieux fût défaillant, mais parce que Bibi venait de défourailler.

Juste retour du destin: il morfla ma bastos en pleine tête.

– Un à un! annonça le Gros.

Je flinguai les hommes d'escorte avant qu'ils eussent le temps de me déballer leurs calibres.

– Score final: trois‑z'un, déclara Napoléon IV.

 

 

Chaque matin, à son petit déjeuner, Jérémie Blanc mangeait des figues trempées dans l'huile d'olive; son transit intestinal s'en trouvait bien. Toute sa famille grandissante suivait ce régime, ce qui ne l'empêchait pas d'absorber ensuite un classique café au lait et des tartines confiturées.

Ramadé revint de chez le boulanger, lestée de pain frais et de journaux. Son époux lisait Le Monde et la jeune femme Le Parisien libéré aux illustrations plus abondantes. Elle déposa sur la toile cirée de la table ces nourritures destinées au corps et à l'esprit en se plaignant du temps. Il tombait de la neige fondue qu'une bise sinistre projetait au visage. Pour preuve, elle montra son bout de nez sombre qui se mettait à rougeoyer comme celui d'un clown.

Son mari lui sourit tendrement, heureux de se retrouver avec les siens après les péripéties vécues en Arabie Orthodontique.

Soudain, Capote‑anglaise‑trouée, le troisième enfant de ce foyer béni s'écria:

– P'pa! Y a toi dans le journal!

Il désignait une photo à la une du Parisien.

Le policier s'en saisit et vit qu'il ne s'agissait pas de lui mais de son cousin Monosperme. Le titre glaça son sang africain: «UN TUEUR NOIR TRAQUÉ DANS PARIS.» Le cœur affolé, la gorge cotonneuse, il lut l'article consacré aux méfaits de son parent. Ce dernier, au sortir d'une garde à vue, avait contraint une femme détective à le suivre dans un hôtel borgne, l'avait violée sauvagement, à plusieurs reprises; puis, subtilisant son arme de service, l'utilisa pour abattre un jeune inspecteur qui tentait de l'appréhender. Toujours au cours de cette équipée, se payant d'un culot phénoménal, le dénommé Monosperme Blanc contraignit le conducteur d'une voiture de police à l'emmener dans une impasse proche de la porte d'Italie où il l'assomma avec la crosse de son soufflant. Les coups furent portés avec tant de sauvagerie qu'ils lui occasionnèrent une fracture du crâne. La brigade des homicides ratissait le quartier.

Date: 2015-12-13; view: 435; Íàðóøåíèå àâòîðñêèõ ïðàâ; Ïîìîùü â íàïèñàíèè ðàáîòû --> ÑÞÄÀ...



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